Wendmi Hyacinthe Kabré est un artiste-comédien, diplômé de la première promotion de la filière art dramatique de l’université de Ouaga I. Membre du Théâtre de la fraternité, l’homme est pieds et poings liés dans la pratique théâtrale et artistique. En plus d’être comédien, il est metteur en scène et acteur de cinéma. Il est également auteur dramaturge. Il s’est confié à une équipe de Sortir.bf en début janvier 2024 sur sa passion pour le théâtre et ce que cet art représente pour lui.
Wendmi Hyachinte Kabré nous reçoit avec beaucoup d’enthousiasme alors qu’il vient tout juste de terminer la répétition d’une pièce de théâtre avec son équipe une pièce. « C’est toujours un plaisir de parler théâtre », sourit-il. Et en fait de théâtre, le jeune metteur en scène est prompt à développer sa compréhension : « il y a théâtre parce que quelqu’un dit quelque chose quelque part à quelqu’un afin de… ». Pour lui, dès que tu réunis des gens à qui tu as envie de raconter une histoire, on est déjà dans le théâtre. « Vous savez les gens disent, parlant de l’origine, que le premier spectacle c’est quand déjà nos ancêtres se réunissaient autour du feu. Y en a qui prétendaient que ce n’était pas pour se réchauffer mais pour regarder le spectacle des flammes », poursuit le dramaturge. Il laisse entendre que le théâtre est l’art simulacre percole, c’est-à-dire comment on se projette sur quelque chose. « Comme le disait quelqu’un, c’est comme si nous nous imprégnons de la réalité des faits en jouant », ajoute-t-il.
Parlant du rôle du théâtre Wendmi Kabré convoque Brèche qui disait que « la fonction première du théâtre c’est de divertir, d’éduquer ». « Parfois on a le sentiment que le théâtre c’est pour éduquer ou pour faire ceci. Non le théâtre peut éduquer mais d’abord c’est un art fait pour le divertissement, parce qu’aujourd’hui on a tendance à demander aux artistes d’être des éducateurs, de se substituer parfois aux imans, aux prêtres et autres », laisse entendre le metteur en scène. Pour lui, l’art ne saurait être quantifié. « A quoi est ce qu’on quantifie par exemple une œuvre musicale ou une pièce de théâtre ? Est-ce qu’on le quantifie au message ou aux sous que ça fait rentrer ou est-ce que l’important ce sont les questionnements qui se posent dans ces œuvres. Aujourd’hui par exemple, si je prends un médecin ou un chirurgien qui, avant de rentrer opérer un patient, a besoin d’écouter un Floby par exemple pour se concentrer. Comment peut-on quantifier le bien que Floby lui fait pour qu’il rentre soigner le patient, ça veut dire donc qu’à un certain moment l’artiste vit dans une société et les œuvres que les artistes montent sont ancrées dans cette société pour attirer l’attention de la société par rapport à un certain nombre de choses ou encore pour se projeter dans quelque chose à venir », souligne Wendmi Kabré. Et d’ajouter que l’art est à la fois le questionnement permanent de notre présent, de ce que nous avons vécu, dans le but donc de se projeter sur le futur.
A la question de savoir si le théâtre nourrit son homme, l’artiste répond qu’il vit essentiellement du théâtre. Wendmi Kabré note qu’il n’y a pas de grille qui définisse ce que chaque professionnel du théâtre doit gagner dans une création, mais confie qu’il arrive tout de même à s’en sortir. Le dramaturge rappelle que dans le cadre de la valorisation de l’artiste, l’application du décret y relatif tarde à être effective.
L’acteur relève que ce n’est d’ailleurs pas seulement au Burkina Faso que la condition de l’artiste ou du praticien du théâtre est difficile, c’est partout au monde que le métier de l’artiste est difficile, parce qu’il faut parfois détacher les artistes standards des grandes stars qui brassent des millions.
« Dire qu’au Burkina les gens s’en foutent pas mal des artistes, ce n’est pas forcément vrai. Il faut maintenant qu’il y ait plus de mécanismes de financement pour que les artistes puissent vivre dignement. On ne demande pas forcément à être des millionnaires. Mais lorsque des artistes sont dans une création qu’ils puissent en vivre décemment », déclare-t-il.
Dans le même ordre d’idée, Wendmi Hyacinthe Kabré ajoute qu’il y a des créations pour lesquelles les artistes s’investissent tout en sachant qu’ils ne pourront même pas recouvrer ne serait-ce que leurs dépenses, mais ils le font parce qu’ils croient que le projet peut apporter quelque chose de positif dans la société. L’acteur ne regrette pas d’avoir choisi le théâtre comme profession. « Peut-être que si je ne faisais pas du théâtre, je ne serais pas un homme fréquentable, parce que vous ne savez pas ce que cela m’apporte. Si tu le qualifie à l’avoir, tu peux avoir du regret mais le bien-être que cela procure, le sourire que tu procures à une personne qui a oublié ses soucis, qui est venu voir un spectacle et cette personne qui a abandonné son projet de suicide après avoir vu un spectacle car il a retrouvé l’espoir, ça tu le quantifies comment », relativise-t-il.